En réduisant considérablement les effets des antibiotiques, la formation de communautés organisées de cellules bactériennes, connue sous le nom de biofilms, peut être mortelle notamment en post-op ou au cours d'infections des voies urinaires. Cette équipe de Yale vient tout juste de décrypter le processus de formation de ces biofilms. Avec cette nouvelle compréhension de ces formes de résistance très efficaces aux antibiotiques, l’équipe suggère aussi de nouveaux moyens de les arrêter.
Les biofilms se forment lorsque les cellules bactériennes se rassemblent et développent des structures qui les lient en une substance gluante, rappellent les chercheurs. Cette membrane collante peut protéger les cellules du monde extérieur et leur permettre de former des quasi-organismes complexes. D’ailleurs, les biofilms sont partout, dans les cabines de douche ou à la surface de plans d’eau. Cependant, lorsqu’ils envahissent les cellules humaines ou se forment sur des sutures et des cathéters utilisés lors de chirurgies, ils forment une masse indestructible et résistante aux antibiotiques. Des milliers de décès sont ainsi imputables à des infections du site opératoire (ISO), à des infections associées aux soins (IAS) et à des infections des voies urinaires liées aux biofilms.
Les biofilms constituent ainsi un problème médical majeur, car ils rendent les infections bactériennes extrêmement difficiles à traiter, rappelle l’auteur principal, Andre Levchenko. Mais si la lutte contre les biofilms est si difficile c’est aussi parce qu’on ne comprend pas bien comment les cellules bactériennes effectuent la transition entre un comportement individuel et une participation à une structure collective. L’équipe de la Yale, en collaboration avec des collègues de l'Université de Californie San Diego, décryptent ici le mécanisme clé de formation du biofilm, ce qui leur permet ensuite de reproduire, sous contrôle et sous observation, le processus.
Une croissance incontrôlée et un stress auto-généré : à l’aide de dispositifs microfluidiques et de gels contenant des cellules uropathogènes d'E. Coli, telles qu’à l'origine d'infections des voies urinaires, les scientifiques observent que les colonies bactériennes se développent au point d'être comprimées par les parois de la chambre du dispositif. Ce stress auto-généré semble être le déclencheur même de la formation du biofilm : « les cellules sont alors soumises à un stress biologique et ce stress semble provenir de cette interaction mécanique avec l'environnement ».
Un modèle reproductible pour étudier le biofilm : Les chercheurs peuvent désormais explorer la formation de biofilms dans d'innombrables environnements ou même plus simplement, utiliser les dispositifs présentés dans cette étude pour produire des biofilms rapidement, avec précision et en grand nombre, de manière simple, peu coûteuse et reproductible. Cette nouvelle compréhension du mécanisme de formation du biofilm va bien évidemment faciliter considérablement la recherche et les tests de nouveaux antimicrobiens capables de percer la couche protectrice des biofilms puis de les décomposer.
« Il est indispensable d'avoir un modèle comme celui-ci pour mener les essais de médicaments. Nous pouvons maintenant cultiver des biofilms dans des formes et des lieux spécifiques de manière totalement prévisible ».
Source: Nature Communications 05 October 2018 Self-induced mechanical stress can trigger biofilm formation in uropathogenic Escherichia coli
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