De nombreuses personnes se tournent vers leurs proches avant une prise de décision importante. C’est un peu le même principe chez nos cellules immunitaires : après avoir migré vers un site d'infection possible, les macrophages se rassemblent, se dénombrent et se coordonnent avec leurs voisins afin de décider s’il faut passer à la vitesse supérieure. C’est la stratégie sous-jacente à la réponse immunitaire, décrite par ces travaux de la Northwestern University, présentés dans la revue Nature Communications. Ces travaux nous expliquent comment le système immunitaire doit trouver le bon équilibre entre une réponse à une menace réelle ou une réaction excessive.
Ces travaux ne sont pas sans implication : ils vont être utiles pour concevoir des immunothérapies anticancéreuses ou des traitements plus efficaces pour les maladies auto-immunes. Si les scientifiques et les médecins savent depuis longtemps que les cellules immunitaires migrent vers le site d'une infection, avec une réaction d’inflammation, cette équipe explique que ce rassemblement n'est pas seulement une conséquence de l'activation immunitaire. Les cellules immunitaires comptent leurs voisines, « une étape de la fonction immunitaire qui n'était pas connue jusque-là », commente le co-auteur de l’étude, le Dr Joshua Leonard, professeur agrégé de génie chimique et biologique à la Northwestern.
Les cellules immunitaires apportent une réponse concertée et coordonnée
Un consensus cellulaire précède la réponse immunitaire : en effet, ces cellules ne s'activent pas uniformément mais décident collectivement du nombre de cellules qui vont s'activer, afin qu'ensemble, le système puisse repousser une menace mais sans réagir de manière excessive. Ce sont de nouvelles techniques d’analyse et de nouveaux modèles informatiques qui permettent ici aux scientifiques de comprendre comment les cellules effectuent leurs calculs pour prendre des décisions cohérentes. Ces modèles montrent que le système immunitaire du corps travaille constamment pour maintenir un équilibre délicat.
Les chercheurs examinent les macrophages, un type de cellule immunitaire qui fait partie de la première ligne de défense pour lutter contre les infections et les maladies. Ils observent comment ces cellules répondent à un produit chimique produit par des bactéries – un signal d’infection – au niveau cellulaire. Les modèles informatiques les aident ensuite à interpréter et à expliquer leurs observations : les cellules observent leurs voisines pour « se faire une idée » de la sévérité de la situation. Chaque cellule est alors prête à répondre ou non. Cependant, il se produit avant une sorte de « concertation », « un niveau décisionnel supplémentaire » qui contrôle le système immunitaire.
« Les réponses immunitaires, c'est la différence entre la vie et la mort » : si le corps réagit de manière excessive à une infection bactérienne, il peut se produire un choc septique. Si le corps ne répond pas suffisamment, l’infection peut se développer et entraîner le décès. Pour rester en bonne santé, le corps doit trouver un équilibre entre ces extrêmes.
Les chercheurs pensent que ces informations pourraient être utilisées pour aider à concevoir de meilleurs médicaments ainsi que pour guider l'ingénierie des thérapies cellulaires avancées : « La biologie a évolué de manière fascinante et surprenante qui ouvre des voies de contrôle de processus complexes ».
« En tant que biologistes synthétiques, nous travaillons à concevoir des cellules capables d’effectuer des fonctions thérapeutiques personnalisées, telles que l'activation du système immunitaire localement sur un site tumoral. Comprendre les mécanismes naturels nous permet d'être meilleurs ».
Source: Nature Communications 13 February 2020 Macrophages employ quorum licensing to regulate collective activation (Schéma Northwestern University)