C’est une prouesse biologique, le développement d’un système synthétique 100% liquide et compartimenté un peu comme des cellules réelles. La technologie nommée « 3D water-on-water printing » ou impression 3D eau-dans l'eau, permet de reconstituer et de programmer de véritables cascades biologiques. Entre autres applications, ce développement du laboratoire de recherche de l’armée américaine et de l’Université du Massachusetts va permettre de concevoir de nouveaux dispositifs d’administration de médicaments et de soin de plaies.
Les scientifiques exploitent des différences de charge électrique pour déclencher les fonctionnalités de ce système « tout aqueux » ou « liquide dans le liquide », permettant donc de compartimenter plusieurs composants liquides en un système biologique synthétique unique. La structure (liquide) obtenue est stable, possède donc plusieurs fonctionnalités chimiques ou thérapeutiques, est respectueuse de l'environnement et biocompatible, explique l’auteur principal, le Dr. Evan Runnerstrom, responsable du programme de conception de matériaux à l’Army Research Office (ARO). L’auteur décrit tout un spectre d’applications possibles comme des batteries entièrement liquides, la purification de l'eau, l'administration des médicaments et le traitement des plaies.
La technologie « 3D water-on-water printing » ouvre d’infinies possibilités de délivrer des médicaments de manière beaucoup mieux contrôlée.
Une impression 3D d’eau dans l’eau : les chercheurs utilisent 2 solutions aqueuses polymères, l'une de polyéthylèneglycol (PEG) et d'eau, l'autre de dextrane (colloïde) et d'eau, avec des charges électriques différentes. Ces 2 solutions peuvent être combinées mais ne se mélangent pas. Ensuite, une aiguille injecte un jet à grande vitesse de solution dextrane+eau dans la solution de PEG+eau, une technique décrite comme une « impression 3D d’eau dans l’eau » (Voir visuel ci-contre). L’opération aboutit à un cylindre aqueux, une couche membraneuse séparant les deux solutions.
Un système aqueux à fonctions compartimentées : le système imite le comportement des cellules vivantes, formées elles-aussi d’une solution aqueuse dans laquelle se trouvent plusieurs biomolécules. L’autre caractéristique du système est que la charge électrique détermine si et dans quelle direction un composé peut passer à travers la membrane et se diffuser. Les chercheurs peuvent ainsi programmer une réaction à l'intérieur du tube qui va générer une molécule chargée positivement et qui ne pourra se diffuser que dans la phase positive. Ils peuvent également également programmer une cascade de réactions « comme cela se produit naturellement dans notre corps » : « Nous pouvons construire des structures multicouches avec des couches positives / négatives / positives ». Avec cette technologie, il est ainsi possible de faire coexister de nombreux processus en même temps impliquant de nombreux composants chimiques.
- Sous l’angle soin des plaies, la mise au point de ce système aqueux stable et biocompatible, va permettre avec un stimulus artificiel, tel que l’ouverture de l’emballage du pansement, de libérer un ou plusieurs médicaments sur la plaie, et en fonction des caractéristiques de la plaie.
- Sous l’angle médicament, le système pourra permettre d’intégrer dans des produits liquides existants, comme des gels coagulants, d’autres molécules sous forme liquide qui pourront être délivrées si besoin.
Un véritable mimétisme biologique : « notre système est très proche du système vasculaire et imite les processus biologiques caractérisés par le passage de molécules à travers une membrane. Certaines molécules peuvent être compartimentées, comme dans de vraies cellules, sans utiliser de solvants organiques ni d’huile, uniquement de l’eau ».
Source: Chem October 10, 2019 Compartmentalized, All-Aqueous Flow-Through-Coordinated Reaction Systems (Visuel 2 UMass Amherst)