La phase de détersion (ou inflammatoire) amorce le processus de cicatrisation pour permettre le bourgeonnement progressif de la plaie, vers sa fermeture. Elle est dans la grande majorité des situations accompagnée de gestes (ex : débridement mécanique) et /ou techniques de soins (application de pansements très humides) afin de raccourcir tant que possible cette première étape.
Des exceptions échappent bien sûr à cette règle générale. En effet, la détersion « active » de plaies peut devoir être temporisée,
· dans le but de laisser la plaie se recouvrir progressivement d'une nécrose sèche, bien délimitée, dont on attendra la chute spontanée et / ou à retirer d'un bloc. C'est le cas des plaies artérielles, en absence de revascularisation possible, mais aussi de certaines plaies post-opératoires dont les prises en charge sont sous la responsabilité des chirurgiens ;
· dans des situations particulières telles qu'en phase terminale d'une maladie où le rapport bénéfice-risque d'une détersion est en faveur d'une abstention (ex : escarre nécrotique mais stable et / ou non symptomatique) ou encore sur des plaies dont la cicatrisation n'est pas attendue comme les plaies tumorales évolutives et si un geste de détersion risque de majorer les saignements ou la douleur.
La détersion, une étape essentielle à la cicatrisation : Réaliser une détersion efficace reste dans la plupart des cas un élément essentiel pour permettre à une plaie d'évoluer favorablement (ex : escarre, ulcère veineux). Il s'agit le plus souvent de retirer les tissus nécrosés et/ou la fibrine présente en excès.
Le mot nécrose (en grec : nekrôsis) est très explicite puisqu'il signifie : mortification. Dévitalisés, ces tissus empêchent non seulement la formation du tissu de granulation (obstacle) mais créent également un environnement très favorable à la prolifération bactérienne. Ils accroissent de ce fait les risques infectieux et d'altération.
La nécrose peut-être sèche (noire) ou humide (jaune), épaisse ou superficielle, colorée selon la colonisation bactérienne qui l'accompagne (ex : bleu / vert : Pseudomonas aeruginosa). La nécrose humide est celle qui majore le plus le risque infectieux et l'apparition de symptômes telle que des odeurs. Elle doit être retirée.
Que recouvre l'action de détersion ? Le terme « détersion » est communément admis pour désigner l'ablation des tissus dévitalisés. Pour autant, en se référant à sa définition, il signifie : « action de déterger » (Petit Larousse) et donc de nettoyer une plaie. Il est d'ailleurs souvent employé dans ce sens par les infirmières hygiénistes pour désigner la décontamination. De même, il peut être recommandé de réaliser une détersion mécanique des plaies en absence de nécrose (« racler » la surface de la plaie) dans des indications particulières telle que la présence de biofilm. En effet, en mode biofilm, les bactéries qui colonisent la plaie se structurent en communauté et créent une matrice qui les protège des agressions extérieures. La présence d'un biofilm prolonge la phase inflammatoire et expose la plaie à des épisodes infectieux récurrents. Un débridement superficiel mais régulier permet de perméabiliser la matrice et rendre efficace les antimicrobiens et / ou solutions anti-biofilm.
En pratique clinique, le passage d'une phase de détersion à l'amorce d'un bourgeonnement est un processus progressif, sauf si la détersion a été effectuée chirurgicalement. L'objectif est bien sûr que la détersion soit la plus courte possible. Pour ce faire, il est nécessaire de choisir pour chaque patient et chaque plaie le mode de détersion le plus adapté (ex : mécanique, autolytique) et corriger simultanément les facteurs étiologiques et / ou de retard de cicatrisation susceptibles de favoriser la reformation rapide de la nécrose (ex : hyperpression en regard de la plaie, insuffisance vasculaire, infection).
Même si la détersion est le plus souvent abordée comme un objectif de soin « local » ou une action limitée à la plaie, elle relève finalement d'une prise en charge globale du patient, surtout lorsqu'il s'agit de plaies chroniques (ex : levée des pressions, contention, traitement de l'infection).
Newsletter Plaies et Cicatrisation, réalisée en partenariat avec Paul Hartmann
Auteur: Isabelle Fromantin, Infirmière experte Plaies et Cicatrisation-Institut Curie